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Helgi Hrafn Jonsson – Mugison – FM Belfast
25/02/2010
Le Botanique - Bruxelles (B)

Comme un écho à la très belle soirée 100% Danoise que le Botanique nous avait concoctée en octobre dernier (lire la review), c’est un plateau tout Islandais que La Rotonde accueille cette fois, en ce jeudi 25 février.

Premier à entrer en scène, Helgi Hrafn Jonsson propose des compositions pop-folk Helgi Hrafn Jonssontrès conventionnelles, pour ne pas dire déjà entendues. Toutefois, son timbre de voix, qui évoque parfois Thom Yorke ou encore le Matthew Bellamy des débuts de Muse, retient davantage l’attention. Très à l’aise dans cette formule guitare-voix, le jeune homme sert un set à la fois décontracté et pleinement maîtrisé, recevant un retour chaleureux de la part du public.

Au final, en une grosse demi-heure, Helgi Hrafn Jonsson parvient à tirer son épingle du jeu, plus par l’exécution toute en finesse et en nuances de sa musique que par sa musique elle-même. Une agréable ouverture de soirée.

Annoncé comme tête d’affiche légitime, Mugison se présente finalement en second, pour des raisons inexpliquées, mais on comprendra parfaitement pourquoi un peu plus tard…

Comme son prédécesseur, c’est seul en scène qu’il assure sa prestation, s’accompagnant à Mugisonla guitare ainsi que d’un étrange instrument bricolé maison, sorte de clavier dont chaque touche produit un son de guitare samplé. Comme son prédécesseur également, c’est sa voix qui marque aussitôt les esprits. Intense, profonde, rauque voire même éraillée parfois, quoique d’une justesse toujours irréprochable ; une vraie voix de bluesman en somme ! Mais toute comparaison avec Helgi Hrafn Jonsson s’arrête là, car ici, les compositions suivent, et le bonhomme n’a pas besoin de forcer son talent pour décrire un univers à la fois subtil et sauvage. Mugison n’interprète pas sa musique, il l’incarne de tout son être.

Entre deux morceaux, l’homme se rince les cordes vocales au pur malt, plaisante sur la situation actuelle de son pays et y va de ses petites histoires : sa première fois au Botanique (un kebab à la fraîcheur douteuse l’avait placé dans une situation plutôt inconfortable !), son expérience de marin lorsqu’il avait 17 ans (un univers d’hommes, la mer, un univers d’hommes qui s’ennuient, et des hommes qui s’ennuient…). Tout ça s’imbrique à la perfection et participe de la construction d’un set fluide et cohérent.

Au-delà de cette maîtrise impeccable de l’espace scène, ce qui séduit surtout c’est la grande liberté de ton que s’autorise Mugison. Bousculant délibérément le registre musical dans lequel il s’inscrit cependant parfaitement, l’homme n’hésite pas à plaquer des vocaux chargés d’énergie crasse sur des lignes de guitare pures, allant même jusqu’à pousser de ces rugissements gutturaux que ne renieraient pas certains chanteurs de death-metal.
45 petites minutes et puis s’en va ; et puis revient car le public ne l’entend vraiment pas ainsi ; et puis s’en va de nouveau, définitivement cette fois ; quoique…
Une excellente prestation, remplie de chaleur et de spontanéité.

En dehors de la nationalité, on se rendra vite compte qu’il n’y a guère de point commun entre FM Belfastles deux artistes qui viennent de jouer et les 6 de FM Belfast qui entrent en scène enfin – ou qui entrent en piste plutôt ! Si sur CD, leur électro-dancefloor séduit, certes, mais sans pour autant déclencher les passions ; en live, les compositions, généreusement étirées jusqu’à dépasser allégrement le double de leur durée studio, prennent une dimension simplement extraordinaire ! Et il faut être d’humeur passablement morose pour résister aux beats infernaux que les 6 trublions déroulent avec un plaisir communicatif.

Bourrés d’humour (We come from a place where we count the days until nothing until nothing until nothing) tous tombent très vite le pantalon, à l’exception de la chanteuse ! et assurent le spectacle en caleçon ou en short satin style footballeur des années 70, sans toutefois quitter les chemisettes cintrées et n½uds papillons. Le public réagit au quart de tour, s’asseyant lorsque the sound is getting down et se remettant à sauter les bras levés lorsque the sound is getting up ! Même Mugison, dont la musique n’est pas à proprement parler festive, surgit des coulisses en caleçon long et chaussettes et se joint au foutoir joyeusement organisé par ses compatriotes, le temps de quelques titres.

Tout à fait décomplexés, les FM Belfast s’autorisent tout et réussissent tout avec la manière, y compris une reprise très personnelle du cultissime Killing In The Name de Rage Against The Machine, dont les Fuck You I Won’t Do What You Tell Me transforment la fosse en une marée ondulante d’où émergent des dizaines de majeurs tendus vers le dôme de La Rotonde – magique !
En une petite cinquantaine de minutes, rappel compris, FM Belfast construit le set parfait, qui tient plus de la performance que du simple concert. Tonique et réjouissant ! On aurait bien pris un peu de rab’ histoire de terminer tranquillement l’hiver en attendant le printemps.

Olivier Bodart


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